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" 'Green They Shone' : The Poem As Environment"

D.H. Lawrence Review
50th Anniversary Issue



"J. Hillis Miller's All Souls' Day: Formalism and Historicism in Victorian and Modern Fiction Studies"

Reading Nineteenth-Century Literature: Essays in Honor of J. Hillis Miller
Eds. Julian Wolfreys and Monika Szuba

Edinburgh: Edinburgh University Press (UK)
New York: Oxford University Press (USA)

2017

"The Feudal Unconscious:
Capitalism and the Family Romance"

October 159 (Winter 2017)
MIT Press




Now Available

Portuguese translation of THE MYTH OF POPULAR CULTURE (Blackwell Manifestos, 2010) now available from Tinta Negra (Rio de Janeiro, 2015)



OS MITOS DA CULTURA POP: DE DANTE A DYLAN

O renomado crítico cultural americano Perry Meisel detona as noções convencionais sobre a divisão entre “alta” e “baixa” cultura.

O autor transita pela provocante teoria de que a cultura pop experimentou ritmos dialéticos. A hábil análise que o livro apresenta de três tradições culturais duradouras – o romance norte-americano, Hollywood, e o rock inglês e americano – nos leva a um ciclo histórico da cultura pop que tem Dante como ponto de partida e revisita ícones como Wahrol, Melville, Hemingway, Twain, Eisenstein, Benjamin, Scorsese e Sinatra.



THE MYTH OF POPULAR CULTURE: FROM DANTE TO DYLAN

The Myth of Popular Culture discusses the dialectic of "highbrow" and "lowbrow" in popular culture through an examination of literature, film, and popular music. With topics ranging from John Keats to John Ford, the book responds to Adorno's theory that popular culture is not dialectical by showing that it is.

Available as eBooks

COURSE IN GENERAL LINGUISTICS. Trans. Wade Baskin. Co-ed. with Haun Saussy. By Ferdinand de Saussure (Columbia University Press, 2011)

THE MYTH OF POPULAR CULTURE: FROM DANTE TO DYLAN
(
Blackwell Manifestos, 2010)

THE LITERARY FREUD (Routledge, 2007)

THE COWBOY AND THE DANDY: CROSSING OVER FROM ROMANTICISM TO ROCK AND ROLL (Oxford University Press, 1998)

FREUD: A COLLECTION OF CRITICAL ESSAYS (Prentice-Hall, 1981)




10/16/10

L’Affect et l’affectation dans la culture contemporaine

by Perry Meisel
Nous évaluons d’habitude la vie et l’art d’après des coordonnées analytiques où—même quand elles empruntent le nom de Freud—il n’est plus question de ce qui est vraiment à l’œuvre dans le tissu quotidien de la culture contemporaine. C’est le prix qu’elles payent pour le fait d’y vivre, je suppose. Même Freud n’a pas pénétré suffisamment nos esprits pour rendre les choses plus claires. Vous me corrigerez si je ne parle ici que de la vie intellectuelle en Amérique. Notre aveuglement quant à ce que veut dire l’inconscient est bien sûr un symptôme due problème qui se pose à nous aujourd’hui. C’est le problème de la différence, que nous évoquons silencieusement ou non, à tout moment : la différence entre affect et affectation, authenticité et fiction, sincérité et parure.
Les registres qu’il recouvre comprennent d’autres différences significatives pour la façon dont nous organisons notre pensée entre le privé et le public, l’impulsion et l’autorité, la transgression et la loi…la liste est virtuellement infinie. C’est même une différence qui nous a fait mettre en croix nos dirigeants élus, à cette époque d’authenticité qui est en train de s’achever, et dont les chapitres portent les noms de Profumo, Nixon, Jeremy Thorpe.
Rien que ceci soit ordinairement la pâte dont est faite la psychobiographie vulgaire, son expression la plus concise et représentative est sans doute littéraire. On la trouve chez Norman Mailer, dans Un rêve américain en 1964. La myopie des suppositions contenues dans la citation qui suit, au sujet de ce que les psychologues de l’égo appellent « l’identité » sera en fait corrigée par Mailer lui-même, comme nous le verrons, dans la ligne de la critique de l’authenticité que nous entreprenons aujourd’hui. Voici ce passage exemplaire de Mailer au milieu de sa carrière, et la notion fondatrice—que nous partageons avec lui—de ce que le héros supporte afin d’arriver à être un symbole public. « Je voudrais—dit le Rojack de Mailer—m’éloigner de la politique avant d’être à jamais séparé de moi-même par la distance entre mon aspect public, qui était devenu primordial à la télévision, apparence presque robuste en fait, et mon histoire d’amour secrète et effarouchée avec les phases de la lune. »
C’est précisément l’éclatement de la différence entre l’affect et l’affectation, le privé et le public, le sentiment et la façade qui menace de détruire Rojack, en tant que politicien dans Un rêve américain.
Et cependant, ironiquement, ce n’est que l’imminent effondrement de cette différence qui permet d’en sentir la valeur ou le sens. C’est, paradoxalement, l’épreuve par laquelle nous n’espérons pas découvrir cette valeur. Essayer d’évaluer l’absence de différence entre affect et affectation, que nous appelons caractère ou intégrité, c’est rechercher une différence qui contient déjà sa propre impossibilité.

Un rêve américain

Cette façon rhétorique de priver de leurs moyens de production certaines machines idéologiques comme le moi n’est pas le seul fait du domaine de la subjectivité. Comme nous le savons bien, parmi les procédures techniques, qu’emploient également la littérature et la psychanalyse se trouve la primauté du langage, spécialement le langage de la narration et de la mémoire qui compose aussi bien les vies que les romans. Tout comme, par exemple, l’absence souhaitée d’une différence entre l’affect et l’authenticité d’un caractère à la fois en nous-mêmes et chez les autres—c’est le problème qui inquiète Rojack « l’authenticité »--de même la coupure nulle, dans le récit, entre ce que les formalistes russes appellent récit et histoire entre le temps du récit et le temps de l’histoire racontée est le moteur du désir qui nous fait lire jusqu’au bout un livre ou continuer de regarder un film. En fait la coupure du récit avec l’histoire, qui cherche à atteindre l’authenticité d’une histoire dans la forme particulière du désir narratif propre et endémique au discours réaliste est un des plus claires modèles auxquels nous puissions faire appel pour élucider les différences opérationnelles qui produisent le désir dans tous ses registres—l’un des plus clair tout spécialement parce que son éclatement est aussi compliqué dès le début par l’assurance de sa propre impossibilité. Par la nécessité du gommage de sa première activité organisatrice dans la soumission à ce qu’elle produit.
Et il y a un modèle qui est encore plus réduit pour ce que nous voulons montrer, c’est la notion spécifique à Harold Bloom du trope, qui situe cet impossible désir de l’identité entre l’affectation, désir naturel à la subjectivité comme au langage littéraire. Pour Bloom—comme pour Derrida—le trope est le trope du chiasme, une figure qui nous permet de voir que le système du désir—c’est-à-dire de la référence comme telle—n’est pas réel empiriquement, mais est une structure rhétorique qui situe l’affect et l’affectation comme fonctions l’une de l’autre. (Je passe ici sur la question maintenant traditionnelle de l’emploi de « structure » dans le contexte de la temporalité.) Le chiasme, par définition, inverse les termes d’une proposition donnée—par exemple : la littérature de science, la science de la littérature—et se propose ainsi comme modèle pour la façon dont est produit l’espace à la fois du personnage et du action. Bloom l’appelle contamination dans écart vis-à-vis de Derrida—et ses exemples incluent la tactique rhétorique du texte de Freud, par laquelle la mutuellement, en une structure de contamination ou de chiasme mutuel. Suivant Laplanche, par exemple, Bloom prétend que la conduite s’appuie rétrospectivement sur une défense qui la précède au niveau de l’histoire mais qui la suit au niveau du récit. C’est le nœud que Lacan noue au niveau du langage littéraire et aussi de la défense psychique, faisant de sa structure chiasmatique une fonction de la référentialité inventive du discours de Freud.
Mais bien que nous puissions faire appel à Bloom, à Lacan, ou à Derrida pour la boucle qui constitue les structures homologues de la subjectivité aussi bien que du récit—interrogeons plutôt une évidence sociale—comme Freud lui-même plutôt que de nous en tenir uniquement au niveau de la théorie. Interrogeons en fait, pour les symptômes, le caractère dramatique, dramatistique, au même dramaturgique de l’histoire contemporaine telle qu’elle se joue à travers l’instrumentalité patente des media. Des exemples à la fois récents et immédiats peuvent être facilement donnés : tout comme la fiction du nettoyage produit par Watergate avait sa racine dans le désir de supprimer la différence entre l’affect et l’affectation—de même un livre comme la nouvelle biographie d’Elvis Presley par Albert Goldman n’insiste pas seulement sur la différence entre le public et le privé. Il fait aussi apparaître le gain idéologique obtenu en faisant la séparation : la possibilité de rendre compte (et dans le cas de Goldman, presque de rejeter) d’un succès public ou artistique comme celui d’Elvis par les vices privés de la personnalité dont le nom y est lié. Le fait que l’on peut considérer la situation dans l’autre sens (l’antisémitisme de Pound, par exemple, coexistant avec sa réputation plutôt que la ruinant véritablement) est en fait une preuve supplémentaire de notre argumentation plutôt que sa réfutation.
Mais s’il y a un discours culturel pour lequel est central à la fois le danger et le désir, le handicap et l’inévitabilité, de l’éclatement de la différence fondatrice bien qu’impossible entre affect et affectation, c’est la pop-music, le rock en particulier. Dans l’art-rock de Manhattan—dans ce qu’on a appelé punk depuis le milieu des années 70—notre querelle théorique sur la différence entre affect et affectation est une question primordiale.
Il est assez facile d’aligner la structure de la problématique punk avec les structures de la subjectivité et du récit par lesquelles nous avons commencé. Dans la boucle de la subjectivité comme dans celle du récit, il y a le produit d’une différence impossible mais désirée entre ce que se trouvait là et ce que se trouvera là—entre le récit et l’histoire, la mémoire et le souvenir : dans le rock l’organisation même de l’espace discoursif procède directement d’une série de doubles significations presqu’avouées. Ces procédés exposent dès le départ les opérations rhétoriques—en fait, chiasmatique—par lesquelles nous plaçons nos normes au rang des dieux.

Le chiasme en action

Je prends pour texte central—texte qui a fourni à mon article son titre et ses termes essentiels—un morceau du premier groupe punk, le plus grand groupe de rock de la décades, les Ramones, morceau intitulé I’m affected dans un album récent End of the Century. Le « double entendre » du titre du morceau, qui et aussi le chœur qui retentit encore et encore dans le morceau, éclaire le paradoxe du nom de l’orchestre, et de ce fait le paradoxe du rock lui-même qui est, pour parler réthoriquement, d’exposer le chiasme en action. Ce qui bouge, ce qui est chargé « d’affect » ou d’émotion, est aussi ce qui est affecté ou simulé. Comment savoir la différence ? Pour les Ramones, la question est indécidable. Le rock est exemplaire parce qu’il est, ainsi, plein d’affectations, de maniérismes, de façon tellement connue en perdant aussi peu contenance, affectations qui nous remuent profondément alors même que nous les savons être de pure fiction, de pur rituel. (Je devrais ici prendre le temps de dire que le jeu de mots en anglais entre affect au sens freudien et affect au sens de jouer ou d’affecter un rôle ne se trouve pas dans les possibilités de son anglais. Je fonde donc le jeu de mots autour duquel s’organise notre discussion, uniquement sur la déviation poétique et séductrice qui nous est permise par l’anglais de Bloomsbury).
Le déguisement familial des Ramones est un autre exemple de la structure de leur humour, en leur faisant échanger la simple allégeance due au fait de jouer dans le même orchestre contre le sentiment (apparemment plus authentique) d’appartenir à une famille. Mais en fait, bien sur, les Ramones n’ont aucun lien de sang—le nom et la chose sont entièrement inventées—même quand ils nous tourmentent en échangeant le sang et la fiction comme des liens d’égale valeur. N’est-ce pas Joyce qui dit que la paternité peut être une fiction légale ?
La fonction qu’a le sujet parlant—ou chantant—en relation avec les modes discursifs qui déterminent son émergence est, qui plus est, le point de mire à la fois des plus récents et des meilleurs éléments de la musique punk ou New Wave. Joan Jett par exemple, chante I love rock ‘n roll, titre de son nouveau 45 tours, certainement pas comme sujet véritable, ni comme ce que nous pourrions, bizarrement, appeler une personne : mais plutôt comme canal serein entre la personnalité et le genre. Notez encore la confusion intentionnelle à l’œuvre dans les noms d’orchestres anglais comme Liquid Liquid ou Medium Medium : dans les deux cas, le même signifiant est utilisé à la fois comme adjectif et comme nom, ce qui pose les questions suivantes : quelle est la différence entre la qualité et la chose elle-même, entre la quiddité et la caractéristique, l’essence et l’attribution ? Nous évaluons nous à la mesure des choses ou des signes ? Même le nom d’un autre nouvel orchestre. A Certain Ratio, joue sur le même problème : un certain rapport est un rapport qui est à la fois précis et incertain.

Notre suprême fiction

Ainsi la raison pour laquelle nous avons l’impression que le rock est le diamant produit par la pression accumulée par l’histoire de la bohème devrait maintenant s’éclaircir. Plus que tout autre discours contemporain, il est obsédé par, et prend comme son scénario même le jeu de l’affect et de l’affectation, du sérieux et de l’imité, de l’angoisse, et de l’ironie, de l’appris et du spontané—et montre comment chacun n’est produit qu’en relation avec l’autre. Le rock ‘n roll est, pour emprunter l’expression de Wallace Stevens, nôtre suprême fiction, celle à laquelle nous croyons le plus aisément du monde, précisément parce que la bouffonnerie et la contamination qui sont secrètement à l’origine de tout ce que nous ressentons quand nous l’entendons est à présent une condition avouée de la musique, à la fois pour ceux qui la jouent et ceux qui l’écoutent.
Et le jeu chiasmatique n’est pas le seul fait de la période punk, même si ce n’est que maintenant qu’il apparaît comme le sujet du rock par excellence. Considérez, par exemple, la double signification du mot rock lui-même : ce qui remue et ce qui est inamovible. Ou considérez le vieux nom donné premier style de bohème de l’Amérique d’après guerre : Beat. Kerouac a lui-même suggéré la double signification à l’œuvre ici : être beat voulant dire à la fois être épuisé « I’m beat » et aussi se sentir en état de béatitude ou de sainteté. La transcendance vers le haut égale la transcendance vers le bas. L’affaiblissement ou la distortion sensorielles égalent la plus grande plénitude de vision—point auquel nous joignons Leary et les années soixante. On peu même mentionner Yoko Ono, son nom est-il un anagramme, qui épelle en les joignant O.K., et Oh no ? Comment évaluer même l’intention ou la distinction dans un tel cas ?
Mais revenons en à la littérature pour voir ce mode avoué de subjectivité et sa présence dans la culture « boho »comme mouvement narratif conscient. Revenons, en fait, à Norman Mailer, cette fois dans un texte très récent,The Executioner’s Song. Là il devient clair que Mailer est allé de la problématique de l’authenticité de la fiction à la fiction de l’authenticité aussi surement que l’a fait le rock lui-même. En fait, avec The Executioner’s Song, nous pouvons voir maintenant que le schéma de toute la carrière de Mailer met en récit la différence indécidable entre l’affect et l’affectation en présentant la différence, non plus comme réelle mais comme stratégique, et en fait chiasmatique. Dans le mouvement même qu’a accompli Mailer, de l’instinctualisme vulgaire due manifeste de 1952, The White Negro, à travers le moment pénible, déjà décrit, d’American Dream en 1964, jusqu'à Executioner’s Song en 1980, sa carrière est passée, consciemment ou non, peu importe, de l’essentialiste au sémiotique, du racisme latent du Beat à la poésie démocratique d’une esthétique punk. Ou, pour le dire autrement. Mailer a infléchi son point de vue, en accord avec l’époque et le tour qu’elle prenait, en lui donnant les diverses teintes que la psychanalyse elle-même a découvert progressivement à la notion qu’avait Freud du Trieb. Si le premier Mailer et aussi le Mailer de la période moyenne aimait à prendre de belles couleurs, à la Laing, l’instinctualisme gratuit du gangster nouvelle vague, The Executioner’s Song déconstruit véritablement notre notion héritée du gangster comme héro tragique en examinant la relation de l’affect et de l’affectation dans Gary Gilmore lui-même. Est-ce que la force de Gilmore vient de l’intérieur ou de l’extérieur ? Est-ce que son affect est fonction de son affectation, ou le contraire ? Ou est-ce que chaque terme n’est en fait rien de plus qu’une fonction de l’autre ?
Ce que met en récit la carrière de Mailer, le punk-rock le répète, de nuit. Ce que les deux ont en commun est, sans aucune gêne et avec une exactitude presque technique, le projet de mettre en question la différence entre l’authenticité et la fiction, et, alternativement, les moyens de la produire.